Erika : 7 ans après, enfin le procès…
C’était en 1999 et Noël approchait, et comme en 1515 les enfants attendaient*… Oui mais voilà, le 12 décembre l’Erika allait gâcher la fête. Ce pétrolier maltais de 185 mètres qui avait atteint l’âge canonique de 24 ans se brisait en deux au large de la Bretagne sud. Le 22 décembre, les nappes investissaient le Morbihan puis le Finistère, puis enfin l’estuaire de la Loire, la Charente-Maritime et la Vendée. En quelques jours, 20000 tonnes de fuel-2 (dénomination française) se déversaient sur 400 Kms de côtes. Plus de 200 000 tonnes de déchets mazoutés allaient être ramassés par près de 20 000 bénévoles et des centaines d’employés municipaux dans une pathétique pagaille.


À cette démesure répond celle du procès qui s’est ouvert le 12 février à Paris : 59 audiences sur 4 mois (3 jours par semaine jusqu’au 13 juin), plusieurs centaines de milliers d’Euros de travaux au Tribunal (maçonnerie, video interne), une douzaine de cols blancs du groupe Total mis en examen, pas moins de quatre candidats aux présidentielles s’y sont déjà montrés ou sont attendus…
Greenpeace s’est porté partie civile aux côtés d’autres « poids lourds » de l’environnement : Eaux et Rivières de Bretagne, WWF, FNE…

Le coût global de la marée noire est de 900 millions d’Euros sur lesquels près de 600 millions resteront à la charge de l’État, à défaut d’une réglementation qui permette de fixer des dommages en proportion des responsabilités de chacun des acteurs.


Et c’est là un des enjeux majeurs de ce procès : actuellement le cadre législatif en vigueur limite considérablement les responsabilités des différents intervenants: affréteur, propriétaire de la cargaison, armateur. Deuxième enjeu majeur, la reconnaissance du préjudice environnemental, une notion encore inexistante alors que la toute nouvelle mouture de la directive européenne sur la sécurité environnementale évoque la définition de la « criminalité environnementale ». Enfin il sera question en filigrane, mais en filigrane seulement, de la toxicité de la cargaison sur laquelle plane un gros, un énorme, doute.


Les deux derniers points cités ne seront pas évoqués sur le fond lors du procès car ils se situent hors du champ de l’instruction qui a été mené. Dans ces conditions, les évoquer serait motif de nullité et l’on repartirait pour plusieurs années encore… Dommage car il y avait là une occasion de « créer du droit » et de montrer ainsi que l’appareil législatif savait s’adapter aux situations nouvelles et à leurs enjeux spécifique. Nul doute que ce n’est que partie remise, car que l’on le veuille ou non, il y aura malheureusement d’autres Érika, d’autres Prestige.


Greenpeace a ouvert un site entièrement consacré à la marée noire : rappel des faits, chronologie, présentation des acteurs…
http://www.affaire-erika.org/
Également précieux, le blog de notre avocat, Maître Faro : audience par audience, les clés pour comprendre cette matière trop souvent absconse qu’est le droit :
http://www.affaire-erika.org/blog